[Concert] Orchestre d'harmonie de Pantin @ Théâtre du fil de l'eau

- 30 avril 2017

Orchestre d'harmonie de Pantin
Oeuvres de Piotr Ilitch Tchaïkovsky, Alexandre Glazounov, Silvestre Revueltas, John Williams, Alfred Reed, Arturo Marquez
Théâtre du fil de l'eau, Pantin

Très belle prestation pleine d'énergie de la part de l'Orchestre d'harmonie de Pantin, formation amatrice dirigée avec beaucoup d'application par Laurent Langard. Le choix des oeuvres est subtil et efficace, leur interprétation pleine d'entrain, les solistes un peu stressés mais tout à fait convaincants, les quelques petites imperfections - quelques moments grinçants de la part des cors - sont largement dépassés par l'envie dont tous font preuve. Une mention toute particulière aux percussionnistes, de jeunes musiciens pour la plupart, mais bourrés de talent, à n'en pas douter !

DK, le 3 mai 2017

[Concert] Maurizio Pollini @ Philharmonie de Paris

- 28 avril 2017

Maurizio Pollini
Frédéric Chopin, Deux nocturnes Op. 27, Ballade N° 3, Ballade N° 4, Berceuse Op. 57, Scherzo N° 1 - Claude Debussy, Préludes (livre II) // Rappels : Debussy, La cathédrale engloutie - Chopin, Scherzo N° 3, Ballade N° 1
Philharmonie de Paris

Maurizio Pollini, fabuleux. Maurizio Pollini, un tout jeune homme de soixante-quinze printemps dont les mains virevoltent prodigieusement. Maurizio Pollini qui illumine Chopin et Debussy devant un parterre éberlué. Maurizio Pollini, une technique incroyable totalement dédiée à ces flots d'émotion dont il nous abreuve avec générosité. Maurizio Pollini, quand il chantonne avec son piano, on dirait presque un môme qui s'amuse de la vie et des choses. Maurizio Pollini, deux heures durant, nous émerveille à chaque instant. Maurizio Pollini qui offre à Paris trois rappels - de très haute technicité. Maurizio Pollini qui nous quitte, Lila, moi, et les autres, sur une standing ovation amplement méritée. Maurizio Pollini, grande maestro !

DK, le 29 avril 2017

La fille de neige de Nikolaï Rimski-Korsakov ~~ Opéra Bastille

La mise en scène et la scénographie de Dmitri Tcherniakov illumine  ce conte de printemps en quatre actes et un prologue. La virevoltante danse des arbres dans le dernier tableau restera un moment de magie pure, inoubliable.

FB


[Théâtre] Les peintres au charbon (m-e-s Marc Delva) @ Théâtre 13 (Seine)

- 25 avril 2017

Les peintres au charbon (de Lee Hall)
Mise en scène : Marc Delva
Théâtre 13 (Seine)

Remarquable moment de théâtre, Les peintres au charbon. Une pièce passionnante, qui narre la rencontre entre un groupe de mineurs du Nord de l'Angleterre avec l'art pictural. Rencontre qui n'a rien d'improbable. Même si c'est un peu au hasard qu'elle se fait. Au sein de l'association d'éducation collective qui réunit ces mineurs, organisés et soucieux de comprendre le monde, certains auraient préféré que l'économie leur soit enseignée. Ne trouvant pas de professeur dans ce domaine - tiens, pas de spécialiste pour les éclairer sur les rouages du système qui les exploite ? Comme c'est étrange ! -, c'est à la peinture qu'ils vont être initiés.

Au-delà de leur donner le goût de peindre - Oliver Kilbourn, Jimmy Floyd, et les autres constitueront bientôt le Ashington Group -, c'est à la rencontre d'eux-mêmes, en tant qu'individus, en tant que groupe aussi, qu'ils vont être amenés. Des moments très émouvants, beaucoup d'humour aussi, d'humanité - même si les femmes n'y ont pas le beau rôle... Working class heroes !

De jeunes acteurs pleins de justesse, une mise en scène épurée et mouvante - les tableaux que l'on ne peut qu'imaginer sur les toiles vierges que les jeunes peintres manipulent, et qui sont projetés en toute fin de représentation, très chouette idée -, et, oui, une fin superbe (no spoiling, je n'en dis pas plus). Un peu plus de deux heures de régal. Bien vu, Vosstanie. Bien joué, Frédo !

DK, le 26 avril 2017

*

"Nous parlons d’artistes libres, mais il n’y a pas de liberté artistique possible avant de nous être emparés des moyens accumulés par le XXe siècle, qui sont pour nous les vrais moyens de la production artistique, et qui condamnent ceux qui en sont privés à n’être pas des artistes de ce temps. Si le contrôle de ces nouveaux moyens n’est pas totalement révolutionnaire, nous pouvons être entraînés vers l’idéal policé d’une société d’abeilles. La domination de la nature peut être révolutionnaire ou devenir l’arme absolue des forces du passé. Les situationnistes se placeront au service de la nécessité de l’oubli. La seule force dont ils peuvent attendre quelque chose est ce prolétariat, théoriquement sans passé, obligé de tout réinventer en permanence, dont Marx disait qu’il « est révolutionnaire ou n’est rien ». Sera-t-il, de notre temps, ou non ? La question est d’importance pour notre propos : le prolétariat doit réaliser l’art." - Bulletin central édité par les sections de Internationale Situationniste

[Concert] Saez @ Zenith de Paris

- 22 avril 2017

Damien Saez
Zénith de Paris

Tu as bien raison, Fredo, "au sommet de son art scénique", ce Damien. Quel concert ! Une dinguerie ! Quatre heures de poésie, de musique, de chaleur, mots qui claquent, saturations qui enivrent. Un artiste concentré et qui se donne, des musiciens appliqués et qui se donnent, un public présent, bien présent, et qui se donne. La musique n'est peut-être alors plus qu'un prétexte. C'est une furieuse envie de vie qui nous porte. Entre rage et mélancolie, oui, ami, "joie de vivre, simplement".

Le noir se fait sur un immense écran qui se déploie. C'est une jeune femme qui nous reçoit dans son endroit de solitude. Elle nous en confie un peu - de douceur aussi, même si ce n'est probablement pas son intention. Il fait Nuit, bien sûr. Elle nous regarde, ou par la fenêtre. Elle parle. Elle nous parle. Et dans ce qu'elle dit, on ne distingue pas vraiment le doux du dingue, le tendre du cruel. Mais il y a sa voix, sa bouche, son regard. L'instant a fait le charme, ou l'inverse. Elle nous emporte. A moins que ce soit cette mélodie au piano qui vient de poindre derrière l'image, et qui peu à peu la dépasse. La jeune femme à sa fenêtre va nous quitter, la lumière se faire sur le piano. La mélodie, c'est lui. C'est l'artiste. Il n'est pas entré sur scène. Il nous a rejoint. C'est parti.

D'abord, il est seul - enfin on est cinq mille - on est seul. A la manière d'un chef d'orchestre, il prend place derrière un pupitre. Il attrape sa guitare et attaque avec son dernier album. Cicatrices en forme de chansons, chansons en forme d'hommage. On est au Zénith, et puis au Bataclan. On est cette jeunesse qui s'est relevée de ça - qui se relève de tout - mais qui boite encore un peu dans sa tête. On n'est plus tout à fait jeunes, et les jeunes non plus. Mais on est debout. Et ce soir, on va chanter, on va danser, on va hurler, on va boire, on va s'aimer, on va vivre, bon dieu ! On va leur gueuler, nos "Fuck you Goldman Sachs" ! On va les prier, toutes les Betty ! On va les brûler, les P'tits Sous ! On va peut-être pas être d'accord sur tout ce qu'il raconte, l'artiste. Mais on est là, en plein. Quel pied !

Le noir à nouveau. C'est un peu brutal pour les plus chauds dans la salle. A leur décharge, ils ne savent pas encore que près de trois heures de spectacle nous attendent encore. La jeune femme revient. Dans ses mots, toute une part de douceur s'est cette fois effacée. Qui est-elle ? Que fait-elle à cette fenêtre ? Pas vraiment le temps de comprendre. Damien Saez et ses musiciens nous récupèrent lentement, dans un calme qui cache la tempête. Oui, les coups vont pleuvoir. Lettre apolitique, Marianne, Fils de France, J'accuse, Pilule, Cigarette, Peuple manifestant, Ma petite couturière... La sociale en prend pour son grade, et ses représentants avec. Il y a des choses simplistes, d'autres maladroites, mais comme ça fait du bien de retrouver ce chanteur qui n'a rien perdu de sa rage, tout au contraire. Bordel, que ça fait du bien !

Ivresse totale sur Rue d'la soif - Bonnie. Fosse et gradins en feu, j'ai rarement vu le Zénith bouger autant - Jamais ? Peut-être pour Die Antwoord il y a deux ans ou le tout premier Renaud en 1984... Damien Saez énergique, musiciens inspirés - l'accordéon apporte un vrai quelque chose -, son impeccable. Tout est au top ! Peut-être cette dernière vidéo projetée un peu en trop - et pas seulement parce que la jeune femme à la fenêtre a laissé la place à un jeune homme près d'un radiateur. La dernière partie est d'une autre émotion encore. On sait qu'il va bien avoir une fin, ce moment de vie que l'on savoure. Alors on se laisse aller à la mélancolie. Jeunesse lève-toi, parce que demain ils votent. J'veux qu'on baise sur ma tombe, parce que l'éternité. Marguerite, Putains vous m'aurez plus, you know ?! - elle sait. La lutte, parce que c'est vivre. Jeune et con, pas loin de vingt piges qui nous narguent. Et Tu y crois... devenu Tu y as cru... Bah tiens !

On y a cru, oui. Il y a dix-sept ans, en l'an 2000, un petit gars chanteur, venu de Dijon, "là où même les chiens s'ennuient", débarque par la télé, chez Gaël Leforestier sur La Cinquième. Et chacun de notre côté, va comprendre, Fred comme moi, on se le prend en pleine tronche. Déjà entre rage et mélancolie, déjà un viveur. On a cru en lui, et il ne nous a pas déçus. Merci Damien Saez !

DK


PS - Un truc assez dingue quand même. Quinze ans entre son premier Zénith et celui-ci, et on dirait que son public n'a pas vieilli. Les rangs des tempes grisonnantes sont un peu plus remplis, d'accord. Mais la jeunesse, celle qui se donne en fosse, celle qui s'ambiance avant que l'artiste vienne, celle qui remue pendant tout le show, celle qui n'hésite pas à pogoter, elle est là ! Et pas qu'en fosse ! Pour tout dire, si on faisait déjà office de vieux au Café de la Danse en 2000, les choses ne se sont pas arrangées. Tant mieux ! Jeunesse, lève-toi !

Damien Saez ~~ Le Zénith de Paris


 Damien Saez, au sommet de son art scénique, accompagné d'une troupe d'une infinie justesse (guitares, batterie, basse et accordéon), nous a offert son meilleur concert depuis 2002 (et avec David notre carte de fidélité est exhaustive) ; un pur moment de partage de quatre heures dans l’allégresse de la musique, porté par un son équilibré. La joie de la rencontre rayonnait sur scène pour cette dernière escale de la tournée 2017 du Manifeste. Et le public ne s'y est pas trompé, portant à bout de bras cet "enfant qui écrivait des poèmes". Joie de la révolte, de la rébellion, joie de l'amour et de la poésie, joie de l'alcool et de l' amitié. Joie de vivre, simplement.


A nous, repartis au large de l'attente, de patienter jusqu' au prochain port!

FB

[Concert] Jan Lisiecki, Jukka Pekka Saraste, Orchestre de Paris @ Philharmonie de Paris

- 20 avril 2017

Jan Lisiecki, Jukka Pekka Saraste, Orchestre de Paris
Frédéric Chopin, Concerto pour piano N° 2 - Dmitri Chostakovitch, Symphonie N° 8
Philharmonie de Paris

Julien, qui avait vu ce même concert la veille, nous avait prévenus. SMS reçu : "C'était quelque chose, ce Chosta ! Magnifique, concentré, très bien sonnant, mais sans aucune concession à l'effet immédiat. Dense, expressif, oppressant. Noyés dans la musique nous sommes. Et la fin extatique. Apaisement ? Non, dissolution, effacement, disparition. Franchement, rarement vu l'Orchestre de Paris sonner comme ça". Et Chopin ? "Le jeune pianiste polonais est un longiligne ange blond à croquer. Virtuose, beaucoup de ruptures dynamiques, c'est du Mozart dans le mouvement lent, du Beethoven dans le troisième, et du Liszt dans le premier. Il est grand donc quand il met la puissance, ça envoie. Un peu mécanique, mais carré et enlevé".

Un concert qui inspire autant l'ami, on allait se régaler, avec Fredo. Et cela n'a pas manqué. Un Concerto N° 2 de Chopin absolument superbe - moi qui ne suis pas plus Chopin que ça, totalement charmé, notamment, c'est vrai, par le mouvement lent. Époustouflant de précision, ce Jan Lisiecki, des pianissimos de toute beauté, chaque note est donnée avec précision et douceur. Un virtuose mais qui sait tout de même s'effacer derrière l'oeuvre. Un brin mécanique, c'est vrai, pas désagréable non plus. Il méritait sans doute un peu plus de gens qui applaudissent et un peu moins de gens qui toussent...

Et quel morceau, cette Symphonie N° 8 ! Julien a tout dit. Et c'est vrai que l'Orchestre de Paris s'en sort plutôt pas mal. Cela dit, l'oeuvre, poignante et très expressive, lui permet de briller. Le coup de baguette de Jukka-Pekka Saraste y est peut-être également pour quelque chose. Une très belle soirée, encore une fois. Bon résumé de Fredo : "Puissance et gravité de Chosta et sous les tilleuls verts de la promenade Chopin et les violons qui bruissent"

DK,  avec JB et FB

[Concert] René Jacobs, RIAS Kammerchor, Akademie für Alte Musik Berlin @ Philharmonie de Paris

- 14 avril 2017

René Jacobs, RIAS Kammerchor, Akademie für Alte Musik Berlin
Johann Sebastian Bach, Passion selon saint Matthieu
Philharmonie de Paris


Julien a raison. Elle était très humaine, cette Passion selon saint Matthieu, interprétée avec beaucoup de douceur, de simplicité, de talent - presque d'allégresse - par René Jacobs "et sa troupe". Humaine. Et c'est ainsi que nous les regardons dorénavant, ces choses du sacré : avec des yeux d'hommes et de femmes. Ni dieu ni maitre !

Merci donc à la Philharmonie de Paris de ne pas avoir eu la même idée que la saison dernière, une énorme croix en guise de décor. Superflue, dans un lieu public par conséquent laïc. Saugrenue même. Si, si ! Imagine-t-on un décor de bateau lorsque Shéhérazade est jouée ? Ou alors, mettons des danseuses les soirs de Boléro, le S de Superman quand est donnée la Symphonie fantastique, et qu'on se lâche un bon coup les soirs du Kindertotenlieder - vraiment, allons-y !


DK, le 17 avril 2017