[Concert] Murray Perahia @ Philharmonie de Paris

- 22 juin 2017

Murray Perahia
Johann Sebastian Bach, Suite française n°6 en mi majeur BWV 817 - Franz Schubert, Impromptus op.142 - Wolfgang Amadeus Mozart, Rondo K.511 - Ludwig van Beethoven, Sonate n°32 op.111
Philharmonie de Paris

Dernier nom au générique : Murray Perahia... Indeed !

Ma saison à la Philharmonie pouvait-elle s'achever autrement qu'avec celui qui en aura tenu le premier rôle ? Premier épisode, ici même en novembre, concertos 1 et 3 de Ludwig, très bien. Deuxième épisode, toujours ici en décembre, concertos 2 et 4 de Ludwig, superbe. Troisième épisode, Barbican London en février, même programme Ludwig que lors du précédent, prodigieux. Quatrième épisode, de retour ici hier soir, un récital de toute beauté qui s'achève sur du Ludwig - saison cohérente jusque dans ses dernières notes.

Une Suite de Bach pour débuter le programme, pleine de lyrisme et de légèreté, collant parfaitement à la saison, au jeu de Murray Perahia. A ce que j'avais envie d'écouter aussi, si j'en juge le mal que j'ai eu à rentrer dans la pièce suivante, plus sombre, des Impromptus de Schubert. Je suis passé totalement à côté du premier, pourtant plein d'une jolie mélancolie. La gravité du deuxième m'a bien rattrapé par l'oreille. Mais c'était peine perdue, j'ai rapidement décroché, pris entre le plaisir Bach et l'impatience Beethoven.

Du coup, mon attention s'est également un peu détournée du Rondo de Mozart. Intuition payante, la sonate de Ludovic de Bonn allait requérir toute mon attention. Découverte d'une oeuvre âpre, poignante, difficile, sur le plan technique pour le pianiste, sur celui de l'émotion pour son auditoire : sombre, sombre, sombre, son premier mouvement ; solennel, énergique, parfois fulgurant - de modernité -, son second.

Dernière sonate composée par Beethoven, la douleur, tant physique que psychique, qui habitait le corps et l'esprit du compositeur durant ses dernières années y est palpable. On y retrouve néanmoins ce processus récurrent dans un bon nombre de ses oeuvres : après la tempête, une forme d'apaisement s'opère. Mais ici, il semble prendre la forme du renoncement. Le tourment et la gravité dont s'est extrait l'orage qui s'est abattu sur nous lors du premier mouvement ayant laissé place au tourment et à la gravité, l'harmonie doit - se - faire avec. C'est l'énergie du désespoir qui nous propulse dans une sorte de transe, qui nous ballote jusqu'à un jazz qui ne peut pas dire son nom. Musique métaphysique, sublimée par l'immense Murray Perahia.

A la saison prochaine, Murray. A la saison prochaine, la Philhar'.

DK

[Concert] Symphonic selections Japanese video game music @ Philharmonie de Paris

- 17 juin 2017

London Symphony Orchestra, Eckehard Stier
Jonne Valtonen, Fanfare - In a Roundabout Way - Nobuo Uematsu, Final Fantasy VI - Symphonic Poem, Final Fantasy VII: Symphony (Mvt II - Words Drowned by Fireworks) - Yoko Shimomura, Kingdom Hearts - Rhapsody - Yasunori Mitsuda, Chrono Trigger/Chrono Cross
Philharmonie de Paris

Un vent de fantasy souffle sur la Philharmonie ce soir-là. La moyenne d'âge a considérablement rajeuni et le public porte barbe mal taillée, lunettes, t shirt large et casquette. Et quel enthousiasme! Même le chef, Eckehard Stier, grand échalas à la mèche disciplinée, roule des hanches quand Rony Barrak entame son solo de darbouka. Là aussi, un percussionniste au premier rang de l'orchestre, c'est inhabituel et ça fait plaisir (dit le jeune percussionniste talentueux qui est assis à côté de moi). Grand moment de recueillement lorsque l'orchestre entame, après l'entracte, la symphonie de Final Fantasy VII. Et l'on sent que le public revit les heures de jeu et de jeunesse. Nobuo Uematsu vient saluer à la fin du concert.

On aura entendu aussi le talentueux pianiste Jonne Valtonen qui est aussi l'arrangeur de ces morceaux, un tubiste rebelle qui entame un solo décalé et un duo comique avec le chef d'orchestre, des morceaux bonus qui régalent les geeks et les musicien-nes du LSO qui ont l'air de prendre grand plaisir à jouer.

On retrouve dans les compositions de Uematsu des influences communes à la musique de Joe Hisaishi, entendu la semaine précédente au Palais des Congrès pour un magnifique concert-madeleine de Proust consacré aux thèmes musicaux des films de Hayao Miyazaki. Interprétation de l'orchestre Lamoureux, dirigé par Hisaishi lui-même et en guest, marching band des musicien-nes de l'Orchestre d'Harmonie de Pantin qui a joué trois morceaux du Château dans le ciel.

Sayonara.

Ed & Elie

[Bienvenue dans l'équipe de La Désannonce, Ed & Elie !]

[Concert] Nicholas Angelich @ Philharmonie de Paris

- 6 juin 2017

Nicholas Angelich
Joseph Haydn, Variations en fa mineur Hob XVII.6 - Ludwig van Beethoven, Sonate n°21 Op.53 "Waldstein" - Johannes Brahms, Variations sur un thème de Paganini, op. 35
Philharmonie de Paris

On avait rencontré Nicholas Angelich un soir de Brahms en mars dernier. Il était alors un peu - beaucoup - dans l'ombre d'un violoniste qui aime bien la lumière. Une position qui semblait lui convenir, un peu en retrait derrière la vitrine. Hier soir, le pianiste était seul sur scène. De quoi nous permettre de prendre la pleine mesure de son talent. Un toucher dynamique, de la virtuosité sans grandiloquence, beaucoup de lyrisme, irréprochable sur le plan technique. Très beau récital de Mister Angelich, salué chaudement par un public moins nombreux qu'à l'accoutumée mais généreux dans ses applaudissements. Il y avait de quoi.

Il faut dire que le programme était absolument top. Trois découvertes emballantes : des variations de Haydn au charme mélodique incroyable, d'autres de Brahms sur le glorieux 24è caprice de Paganini, et cette Sonate Waldstein de Ludovic van B. - le premier mouvement*... Claque magistrale ! Tout ce que j'aime dans la musique de Beethoven y est. Jetez-y une oreille quand vous pourrez.

* Sur Wikipédia, c'est très bien dit : Le début de cet Allegro est à cet égard très parlant. Le cycle harmonique parcouru par le premier thème, en croches, est en quelque sorte un cycle de couleurs. De la même façon, le saut dans l'aigu mélodique (mesure 4) est une touche lumineuse qui apparait sur le grommellement de la basse. Lors de la réexposition du thème, celui-ci passe en double croches : il s'agit ici de bien plus qu'une nouvelle présentation harmonique du thème, c'est d'un nouveau matériau sonore, dense et vibratoire. Ce thème réapparaitra plusieurs fois, à chaque fois sous un nouveau visage, plus intense.

DK, le 7 juin 2017

[Concert] Mitsuko Uchida, Bernard Haitink / London Symphony Orchestra @ Philharmonie de Paris

- 30 mai 2017

Mitsuko Uchida, Bernard Haitink / London Symphony Orchestra
Ludwig van Beethoven, Concerto pour piano N° 3 - Anton Bruckner, Symphonie N° 9
Philharmonie de Paris

L'un des derniers grands rendez-vous de la saison à la Philharmonie de Paris : Mitsuko Uchida, Bernard Haitink, le London Symphony Orchestra, prestigieuse distribution ! Avec Ludovic de Bonn au programme ! Toutes les conditions étaient réunies pour se taper un grand kif. Sauf que...

Le LSO attaque sur un rythme plutôt lent. Un son chaud, élégant, convaincant (hormis une flûte pas du tout au goût de Julien), mais d'emblée l'impression qu'on est dans quelque chose de très classique. Impression confirmée par les premières mesures de la pianiste. Un toucher plein de grâce, c'est certain - en particulier dans les moments en piano et pianissimo, où chaque note est claire et précise. Mais pas beaucoup d'audace. A peine plus d'émotion.

Il faudra attendre son solo - attaqué par de furieux accords plaqués avec gravité, relancés par une recherche de légèreté et de délicatesse, tourbillon de grâce, le tout conclu quasiment par une marche, superbe - pour que le talent de Uchida nous explose en pleine face. Un mouvement lent très beau, avant un rondo qui retombe dans l'excès de classicisme du premier mouvement - avec même quelques problèmes de rythme dans sa conclusion. L'oeuvre, sublime, et l'émotion de voir ces grands noms compenseront la petite déception. Une belle interprétation malgré tout, pas non plus mémorable.

Et puis la Symphonie N°9 de Bruckner en deuxième partie. Bon sang, que c'est chiant, Bruckner ! D'interminables nappes ronflantes, de la grandiloquence, et toujours cette impression que l'alarme incendie vient de se déclencher, et se déclencher encore, et encore, et encore... Ça ne passe pas : je reste totalement hermétique à sa musique.

Cool de croiser Max et Edmée pendant l'entracte. Mais le kif en plus, c'est quand même bien Madame Uchida qui vient s'asseoir dans la salle pour écouter avec nous la deuxième partie. Classe !

DK