- 9 mai 2017
Hilary Hahn, Leonard Slatkin, Orchestre National de Lyon
John Adams, Chairman dances - Piot Ilitch Tchaïkovski, Concerto pour violon en ré majeur Op. 35 - Hector Berlioz, Symphonie fantastique
Philharmonie de Paris
Bien vrai qu'il est magnifique, ce Concerto pour violon de Piotr Ilitch, hein ? Et alors, quand on a la chance de l'entendre deux fois en très peu de temps, par deux interprètes exceptionnelles, on savoure pleinement. Après Sayaka Shoji en décembre dernier à l'Auditorium de la Maison de la Radio, c'est Hilary Hahn qui venait nous en livrer sa version hier soir à la Philharmonie de Paris. Deux registres totalement différents, avec au moins un point commun, celui de nous amener jusqu'à quelques larmiches, Renaud comme moi... Prodigieux moment de musique. Si je mets la magie Vengerov de côté, c'est sans aucun doute mon plus beau moment de violon depuis Gidon Kremer.
Car oui, ce qu'a fait Hilary hier dépasse ce que firent Sayaka ou Joshua (Bell, vu avec Fredo la saison dernière) en leur temps de la même oeuvre. De la première, elle garde l'impressionnante technique - irréprochable de justesse et de précision d'un bout à l'autre - sans se livrer à la même démonstration de virtuosité absolue. Du second, elle garde la douceur, une volonté de beaucoup de délicatesse - et cela même si, comme le dit Renaud, elle a un son ample, qui occupe pleinement l'espace, un peu à la Perlman en effet. A cela, elle ajoute une sorte de simplicité, de décontraction - qui tiendrait presque de la désinvolture -, alors qu'elle joue l'une des oeuvres pour violons les plus ardues*.
Et c'est là, à mon sens, le prodige. Quand tu connais un peu l'oeuvre, tu attends les moments particulièrement exigeants, voire périlleux, d'un point de vue technique, ou essentiels sur le plan de l'émotion. Tu les guettes, les espérant ou les redoutant selon le ton qui est donné. Avec Mademoiselle Hahn, tu ne les vois pas vraiment venir - en fait, elle t'a attrapé depuis bien longtemps, depuis ses premiers coups d'archet. Elle passe toutes les difficultés avec une aisance telle que tu ne les reconnais pas d'emblée. Ils te viennent avec le reste, dans un tout. Tu reconnais l'instant qui fait pour toi le sublime, bien sûr. Mais il est apparu dans celui qui le précédait, tout aussi sublime, et s'est fondra dans le suivant, sans qu'aucun d'eux n'ait à envier à aucun autre. C'est l'oeuvre en plein.
Moment de grâce absolue, pour tout un chacun dans cette salle. Il ne s'est trouvé personne pour rabrouer les gens qui ont applaudi en plein - milieu du premier - mouvement. Personne non plus pour ne pas applaudir entre les - premier et deuxième - mouvements. L'émotion se fout bien des codes et convenances, et elle a raison. Succès amplement mérité - également pour l'Orchestre National de Lyon, même si plus inspiré par Tchaïkovski que par Berlioz.
Pas évident de passer après un tel moment, même quand on s'appelle Berlioz. En revanche, pièce sympa en début de programme, Chairman dances de John Adams,
oeuvre contemporaine entrainante et enjouée, façon musique de film.
DK, le 10 mai 2017
* Ce n'est pas Leopold Auer qui me contredirait. Originellement écrit pour lui, il refusa de jouer ce concerto, le jugeant trop difficile sur le plan technique. Il sera finalement dédié à Adolf Brodsky.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire